Dynamique de révision constitutionnelle en RDC.

 Dynamique de révision constitutionnelle en RDC.
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Bonjour,

Que ce soit l’homme de la rue ou les acteurs politiques tout autant que la société civile, la révision constitutionnelle est dans tous les esprits et dans toutes les lèvres. Pourquoi ? Nous n’allons pas nous y etendre, nous nous bornerons à donner notre point de vue. Avant même que les élections générales ne puissent se tenir à travers le pays, il y a eu des rumeurs qui ont circulé au sein aussi bien de la classe politique que dans l´opinion publique congolaise, sur la caducité de la Constitution « Made in Liège » promulguée en 2006 et tant décriée sur des points cruciaux comme celui relatif à la nationalité congolaise à titre d’exemple, au sujet de laquelle M. Tshiani a initié une proposition de loi dans ce sens ; mais aussi celui concernant l’abandon partiel de la souveraineté de la République Démocratique du Congo au nom d´une certaine « solidarité africaine ». Je puis bien me tromper sur ce dernier point, aussi je souhaite citer l’article y référant, l’article 217 de la Constitution : “ La République Démocratique du Congo peut conclure des traités ou des accords d’association ou de communauté comportant un abandon partiel de souveraineté en vue de promouvoir l’unité africaine”. Voilà ! Du jamias vu. La Constitution de 2006 ne pouvait être plus claire. Ce qui l’est moins, c’est l’interprétation qu’on en fait d’autant plus qu’à notre connaissance l’article en question n’a pas été expliqué comme il se devait aux populations congolaises avant le référendum, et encore moins, qu’aucun de huit pays voisins de la RD Congo n´ait couché une telle disposition dans sa Constitution. Nous pouvons bien nous tromper, on se l’accorde. Mais à quoi rime-t-il en définitive ? En l’état actuel de la situation rd congolaise, les réflexions pleuvent.

Au regard de cet engouement pour la refondation de notre Constitution, M. Ndaywel Isidore, professeur des universités de renom de son état, avait élaboré il y a quelques mois un avant-projet de Constitution dont nous avions même commenté abondamment(1). L’idée ayant fait son chemin, c’est au tour d’une autre sommité, le professeur Lumanu Adolphe cette fois-ci, qui a tenu le 17 février 2024, une conférence-débat sur le sujet ainsi libellé : “Constitution de la RDC du 18 février 2006, 18 ans après quelles réformes indispensables ?”

Nous n’avons pas pu suivre ce débat sur place, mais les médias nous ont éclairés sur les grandes lignes de cet exposé enrichissant. Il aborde essentiellement la question de la nationalité congolaise qui reste jusqu’à ce jour un thème hautement explosif ; mais aussi le volet politique lié à la bonne gouvernance ; les modalités de scrutins électoraux ainsi que les postulants nationaux et provinciaux ; la suppression ou non du Sénat ; la durée du mandat présidentiel, l’élection du président de la république à deux ou un seul tour, la possibilité de la nomination de plusieurs vice-présidences ou non, et bien d’autres choses importantes les unes comme les autres.

Nous notons que la révision constitutionnelle est à l’ordre du jour, si elle n’est pas déjà rédigée et n´attend que sa promulgation au moment opportun. D’autant plus que, selon les médias en question, le professeur Lumanu Adolphe était entouré d’autres sommités politiques et scientifiques, tous professeurs des universités dont le professeur Ndaywel, le tout premier à rédiger un avant-projet de constitution auquel nous avions fait plus haut. Cette présence des professeurs des universités congolais nous enchante et nous incite à croire que le texte du projet de révision constitutionnelle sera rédigé cette fois-ci par des Congolais eux-mêmes, à l’opposé de celle de 2006 dont la rumeur soutient que sa rédaction avait été assurée par des constitutionnalistes belges assisté d’un seul Congolais, lui aussi professeur d’université.

La rédaction de la nouvelle Constitution ou du moins la révision constitutionnelle par des Congolais va nous exonérer de rejeter la responsabilité aux autres, dans le cas où la révision constitutionnelle ne sera pas à la hauteur des attentes et des revendications du peuple congolais. Le but de la conférence-débat tenue par le professeur Lumanu Adolphe, à notre avis, a servi à la collecte de données ; il était important de jauger l´opinion et ainsi savoir ce que pense le Congolais moyen, et comme j´en suis un tout comme vous, je me propose humblement de donner mon avis sur certains points que je juge très importants :

  • De la nationalité. La loi Tshiani devra être retenue, inscrite dans le projet constitutionnel et proposée au référendum. La nationalité congolaise ne peut en aucun cas être retirée d’un(e) congolais(e) originaire des tribus et ethnies du Congo. La RD Congo est le pays des originaires de cet espace géographique, d’autant plus que le Congolais a émigré pour des raisons d’État (mauvaise gouvernance, persécution politique, délabrement du tissu économique, etc.) et a embrassé des nationalités étrangères pour des raisons administratives. Seul le Congolais d’origine peut disposer d’une double nationalité. Il est de notoriété publique que le Congolais lambda de la diaspora aime son pays. (Cfr. statistiques d’envoi de fonds par Western Union).
  • De la souveraineté. L’article 217, déjà cité à la page 1, de la présente Constitution doit disparaître du texte constitutionnel de la République Démocratique du Congo pour raison de souveraineté sans équivoque. L’article est non seulement inutile mais en plus dangereux en entretenant un flou artistique d’interprétation et de discussion oiseuses.
  • Du fédéralisme. Le pays n’est pas encore prêt pour cela. La situation politique ne le permet pas. Pour raisons du rejet du fédéralisme, voir notre article(2). Une certaine élite politique voit dans le fédéralisme un moyen idéal pour faire sécession, et ce, par incapacité à briller sur la scène nationale. Ce n´est donc pas comme on l´aurait supposé, pour cause de gestion économique désastreuse de la République dont elle serait très critique, car elle en est pourtant coresponsable. Elle donne l’exemple du Sud-Kasaï ou Katanga sans s’informer sur les dessous de l’affaire. Tout le monde le sait, sauf cette élite politique qui réclame une autodétermination sans cause réelle, que les sécessions sud-kasaïennes et katangaises n’ont été qu’une manipulation sordide de l’ex-pouvoir colonial belge pour empêcher un gouvernement démocratiquement élu à l´issue d´une élection qu´il a lui-même organisée, de faire son travail. Si tel serait l’exemple à suivre, devrait-on ainsi noter qu’une puissance étrangère serait derrière elle et la manipulerait ?
  • Du civisme. Le professeur Lumena a touché du doigt cette calamiteuse réalité : l’homme congolais. Même si les textes doivent être ajustés, le problème n’est pas le Congolais moyen, mais plutôt la classe dirigeante, l’élite politique et intellectuelle de la République, qui devrait plutôt prêcher par l’exemple ; nous sommes tous au courant de ce qui se passe dans le pays. Son comportement laisse énormenent à désirer et donne le ton de la déchéance morale et politique de la jeunesse. À titre d’exemple, de huit cents partis politiques du pays, lequel d’entre eux anime des séances de civisme et de patriotisme au sein de son parti ? Pas plus de mes dix doigts de la main. Introduisons le civisme dans nos écoles et donnons l’exemple d’une bonne conduite, d’un homme politique responsable, d’un intellectuel exemplaire et le peuple suivra.
  • De la CENI. L’article 211 dispose dans la Constitution ceci :

“ Il est institué une Commission Électorale Nationale Indépendante dotée de la personnalité juridique.

La Commission Électorale Nationale Indépendante est chargée de l’organisation du processus électoral notamment de l’enrôlement des électeurs, de la tenue du fichier électoral, des opérations de vote, du dépouillement et de tout référendum.

Elle assure la régularité du processus électoral et référendaire.

Une loi organique fixe l’organisation et le fonctionnement de la Commission

Électorale Nationale Indépendante”.

Le libellé de cet article doit disparaître de la Constitution. La Ceni est une honte pour l’État congolais ; elle suppose non seulement un manque de confiance absolu entre les acteurs politiques du pouvoir et ceux de l’Opposition, mais aussi elle constitue une fuite de responsabilité dans le chef du pouvoir en exercice. Durant toutes les années de son existence, la Ceni a toujours été contestée lorsqu´il s´agit de l’élection de son président et de la véracité des résultats électoraux qu´elle publie depuis le premier processus électoral de 2006. À la place d’être une source d’apaisement et de confiance, il est devenu une source de déstabilisation politique et sociale. Nous suggérons donc par conséquent que les prérogatives de la Ceni reviennent au ministère régalien de l’Intérieur, afin que la responsabilité du pouvoir organisateur des élections soit clairement établie.

  • Du Sénat. Nous l’avons déjà dit dans nos productions passées : le Sénat n’a pas sa raison d’être dans la situation actuelle pour des raisons essentiellement économiques ; l’expertise de ces hommes et femmes expérimentés qui connaissent à fond le pays pour avoir exercé dans le passé de hautes fonctions nationales et internationales, est vivement souhaitée dans les cabinets ministériels, présidentiels, comme des Conseillers spéciaux par exemple. Je ne voudrais pas laisser croire ici que l’État doit se charger de les caser ailleurs.
  • De l’Assemblée Nationale. Ici, puisque cette institution est plus qu’indispensable dans un pays en marche vers la démocratie, et que l’étendue du pays ainsi que sa démographie imposent le chiffre de cinq cents députés, il est par contre possible de réduire les émoluments et multiples avantages y afférant de ces derniers. La suppression du Sénat et la réduction du salaire des membres de l’Assemblée nationale y aideraient beaucoup dans la perspective de l’épargne de l’État. Cela concerne aussi les ministères de la République.
  • Des ministères de la République Démocratique du Congo. Nous estimons que le nombre de postes ministériels est pléthorique et, de surcroît, budgétivore. Il est significatif tout autant qu’insolite de noter que, à mesure qu’on s’éloigne de la date de juin 1960, le nombre de membres des gouvernements ne fait qu’augmenter. Le gouvernement de M. Lumumba était constitué de 34 membres, celui de Commissaires Généraux de 38, le deuxième gouvernement de M. Kengo en comptait 45, exception faite du gouvernement de M. Laurent-Désiré Kabila de Mars 1999, 34, celui de M. Gizenga a touché la cime des arbres 60, M. Muzito a réduit le sien à 54, tandis que M. Sama Lukonde a remonté la pente à 58 membres pour son gouvernement actuel.

Toujours pour des raisons économiques, nous ne pouvons nous permettre ce luxe alors que le pays est en guerre et que le Gouvernement n’est pas en mesure de proposer un budget à la hauteur des besoins de la République. Le nombre inclut bien entendu les vice-ministres et éventuellement les vice-Premiers ministres, les ministres d’État. De ce constat, nous préconisons la suppression de la moitié des membres du gouvernement en fusionnant certains ministères que nous osons ci-dessous proposer :

  1. Ministère des Affaires Etrangères (Coopération internationale, Intégration régionale, Congolais de l’étranger) & Vice-ministre ;
  2. Ministère de l’Intérieur( Décentralisation, Administration des Territoires) & Vice-ministre ;
  3. Ministère de l’Éducation nationale ( Enseignement primaire, secondaire, technique et universitaire & (vice-ministre) ;
  4. Ministère de la Santé publique ;
  5. Ministère de l’Information et Presse ;
  6. Ministère de l’Économie et des Finances & (vice-ministre) ;
  7. Ministère du Budget ;
  8. Ministère des Mines et Hydrocarbures & (Vice-ministre) ;
  9. Ministère des Travaux publiques, Infrastructures et Aménagement des Territoires & (Vice-ministre) ;
  10. Ministère de l’Environnement et Affaires foncières ;
  11. Ministère de l’Urbanisme et de l’Habitat ;
  12. Ministère de la Défense nationale et des Anciens combattants & (Vice-ministre) ;
  13. Ministère des Transports et Voies de communication ;
  14. Ministère des Postes, Télécommunications et Numérique ;
  15. Ministère du Plan et du Portefeuille & (Vice-ministre) ;
  16. Ministère du Travail et des Affaires sociales ;
  17. Ministère de l’Agriculture, Pêche et Élevage ;
  18. Ministère du Commerce extérieur ;
  19. Ministère de la Culture et Arts ;
  20. Ministère du Tourisme ;
  21. Ministère de la Fonction publique ;
  22. Ministère de la Justice et des Droits de l´homme ;
  23. Ministère de la Jeunesse et Sports ;
  24. Ministère de l’Energie ;
  25. Ministère de l’industrie, PMI et PME & (Vice-ministre) ;

Il est à noter que dans cette proposition les postes de vice-Premiers Ministres et les ministres d’État ne sont pas d’actualité. Ces postes que nous qualifions de super ministres cultivent l’impression d’une certaine ascendance ou d’une supériorité politique de certaines personnalités sur les autres. Nous estimons que la valeur d’un ministre ou du gouvernement dans son ensemble se détermine par la qualité de sa prestation ministérielle ou gouvernementale, reconnue par sa propre population tout autant que par une critique extérieure.

Nous pensons avoir fait notre devoir de citoyen en apportant comme tout le monde quelques propositions au sujet de cette dynamique de la révision constitutionnelle qui semble irréversible dans notre pays.

Bonne journée.

Bababebole Kadite,

Norvège, 02/03/2024.

————————————————————————————————————————-(1) Lire Mon rejet catégorique de l’avant-projet de constitution du Professeur NDAYWEL.

(2) Idem,

info@kamaplustv.net

3 commentaires sur “ Dynamique de révision constitutionnelle en RDC.

  1. Ce document unitile n’est qu’une charte de l’occupation est non une constitution d’ un pays digne de ce nom.

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