Contribution aux dires du pasteur Marcello Tunasi.

Bonjour,

J’ai entendu comme tout Congolais les affirmations du pasteur Marcello lors de son récent prêche dont j´ignore la date, et qui a soulevé une vive polémique, dans laquelle il critiquait le comportement du Congolais à travers deux défunts artistes chanteurs qu´étaient : Papa Wemba et King Kester Emeneya. Lesquels artistes chanteurs seraient d´après lui, à l’origine justement de la dépravation des moeurs. Je n’ai pas non plus raté l’occasion de suivre les confirmations des uns sur ce propos et les infirmations des autres. Et j’ai pensé comme tout le monde que je pourrai aussi participer au débat.

Pour ne pas faire perdre du temps à ceux qui vont me lire, je vais droit au but. Si on ne peut pas nier les propos du pasteur sur le comportement des sapeurs, il n’en demeure pas moins que c’est un choix personnel, certes déplorable aux yeux de ce dernier. Puisque, que ce soit Papa Wemba ou King Kester Emeneya, tous deux ont possédé plusieurs maisons et d´autres biens matériels. Si ces deux personnalités de la trempe de Papa Wemba ou de King Kester Emeneya, ont su marquer leur passage sur la terre congolaise d’une marque indélébile et ont su selon le pasteur détruire toute une jeunesse, quel a donc été son rôle à lui en tant que pasteur Marcello, ou ceux des autres de ses confrères avant lui, pour contrer cette action à leurs yeux néfastes, eux qui détiennent la puissance du Saint-Esprit ?

Ce qui m’a troublé en plus, est cette évocation de notre groupe bantu faite par tant de Congolais, soutenant que selon nos coutumes, toute critque est bannie à l’égard d’un défunt. Parce que, dit-on, il ne plus là pour pouvoir se défendre. En fait, c’est une méconnaissance de la tradition causée par la destruction de notre tissu social traditionnel et de nos valeurs culturelles par le colonialiste européen. D’un côté, dans le monde traditionnel d’avant l’intrusion étrangère, on ne pouvait plus certes parler des agissements éhontés du défunt pour la simple raison qu’il avait déjà été jugé dans sa société pour cela avant sa mort ; et de l’autre, on évoquait la mémoire d’un méchant pour éduquer les générations futures à ne pas suivre son exemple.

Il n´en est nullement question d´une prétendue révélation de Dieu…

Pour en revenir au pasteur Marcello, je ne crois pas que ses propos soient venus de Dieu. Car dans la compréhension chrétienne, quand Dieu parle à quelqu’un, il lui révèle des choses cachées, inexpliquées, futures. Or le pasteur parle des choses que tout le monde connaît, des choses qui se disaient pendant que Papa Wemba vivait encore, entre autres que sa musique d’une manière générale, c’est-à-dire sans distinction, ou sa façon d’être, de se comporter, avait avili la jeunesse. On parle de cela depuis plus des décennies. Qui ne le sait pas, ne vivait pas au Congo, surtout pas à Kinshasa ?

D’ailleurs, pasteur Marcello lui-même confirme ma position quand il affirme avoir dit tout haut ce qui se parle tout bas. Il savait déjà que le colportage battait son plein depuis longtemps. Donc, rien à voir avec Dieu. Il fallait le dire tout haut quand l’intéressé était vivant. Il est donc judicieux de clamer tout haut aujourd’hui tout ce qui se dit tout bas à l’égard de certaines personnalités du monde politique ou culturel de ce pays. Et nous en serions gré, au lieu de ridiculiser Dieu dans des oracles sans fondement. Mais on comprend que pour jouir d’une certaine notoriété, il faut absolument que les ouailles croient que les prêches descendent du trône de Dieu. Même les Chrétiens conscients, ceux qui ne sont pas tombés dans le fanatisme religieux, sont fatigués de : « Dieu m’a dit… Dieu m’a parlé, Dieu ceci, Dieu cela ». Croyez-vous vraiment que Dieu son omnipotence doublée de son omniscience,

souffrirait d´une quelconque carrence pour ne révéler à son sérviteur que ce qui n´est autre qu´un secret de Polichinelle ? Il est donc temps qu’on ait un peu de respect pour Dieu.

Bien entendu, Papa Wemba pouvait bien s’acheter ses fringues puisque le problème de logement ne se posait pas pour lui. Si cela entraîne que ses fans fassent comme lui sans discernement, est-ce là sa faute ? Et pourtant, il les avait avertis quand il chantait : “ Mvuatu vuata nayo, kasi esika ya kolala oyebaka ? La sape est pour ceux qui en ont les moyens. À mon avis, Papa Wemba n’est pas le prince de la sape ; il y a eu dans ce mouvement des précurseurs avant lui, comme son ami Mombele Adrien alias Niarcos et un autre Congolais de l’autre côté du fleuve Congo nommé Djo Balard et consorts. Mais l’on doit toutefois reconnaître que Papa Wemba l’a élevée au zénith de la mode et de l´élégance, grâce justement à son statut d’artiste musicien d´envergure internationale.

Des fringues considérées comme des armes (Bibundeli) est compréhensible dans ce milieu. Il faudrait tenir compte du contexte. Dans le milieu chrétien, c’est le Saint-Esprit. Si le Chrétien doit croire qu’il a la licence divine pour pouvoir distribuer des notes, que le Musulman le croit aussi de sa part, et le traditionnaliste à son tour, que créérait donc t-il ce dénigrement des uns et des autres dans la société congolaise ? Tolérance, tolérance. Bien sûr, pasteur Marcello doit taper sur le mal, mais il doit le faire avec amour, et non avec animosité et autant arrogance qu’il reproche justement à King Kester Emeneya. Mais on en connaît déjà d´avance le refrain, car le Chrétien endurci rétorque souvent que le pasteur parle avec l’autorité du Saint-Esprit. On peut bien s’accorder là-dessus, mais tout le monde ne considère pas la Bible comme un absolu. Changez donc de logiciel !

Et si on lui renvoyait l’ascenseur ? Quel est donc cet esprit qui est derrière lui et qui fait que ses sermons, depuis des années, n’arrivent jamais à perfectionner ses fidèles, puisqu’ils reviennent chaque jour pour écouter la même chose ? À qui doit-on au final imputer cet échec ? À lui ou à ses adeptes ?

Parlons de King Kester Emeneya, de son parler, bon sang ! Il n’a rien créé. C’est le parler d’une catégorie de Kinois né des années 40, bana ya Léo, des personnes qui se nommaient Gurba, Yankee etc. Nous sommes encore là, nous leurs jeunes frères et sœurs, et même leurs enfants. Que les YouTubeurs se baladent dans les premières communes de Léopoldville, ils peuvent avoir la chance de retrouver quelques octogénaires de cette époque, malgré notre faible espérance de vie. King Kester Emeneya a copié ses aînés tels que Gina Efonge comme il avait lui-même souvent révéndiqué de son vivant dans beaucoup de ses interviews télévisées, peut-être qu’il y a mis un peu de sa sauce. Que veut-on donc ? C’était là son look, sa particularité pour se distinguer des autres dans un monde musical congolais et africain où pilule chaque jour d´innonbrables talents. Tout comme le look du pasteur Marcello est l’abondante chevelure noire à la barbe poivre et sel.

Bon ! Ne soyons donc pas si rigoureux envers pasteur Marcello puisqu’il n’a même pas cinquante ans (50) d´âge, et certainement qu’il ne connaît pas grand-chose de l’histoire des habitants de Léopoldville pendant et après la colonisation. Comprenons plutôt les carences dues à sa jeunesse…

Que le pasteur Marcello se calme, il nous a laissé dans son prêche, la désagréable impression qu’il considère son prochain par le volume des billets entassés sur un compte bancaire. C’est bien triste !

Bouder ? C’est le lot d´artistes musiciens congolais entre eux, parce que personne ne veut accepter du moins publiquement que l’autre vaut plus que lui. C’est encore visible parmi la jeune génération d´artistes musiciens. Ne le voit-on pas ? Une fois de plus, si la jeunesse tombe dans ce piège, n’est-ce pas que le pasteur a failli ? Car il semble que la puissance des hommes vaut plus que celle de Dieu, ou disons mieux par respect à la divinité que c’est plutôt le pasteur qui n’est pas à la hauteur du rôle par Dieu lui attribué. Alors pourquoi parler de la poutre dans l’œil de l’autre ?

Est-ce son ignorance du milieu musical, de la musique ou sa hargne contre les artistes musiciens qui a fait dire au pasteur Marcello que King Kester Emeneya ne sait pas chanter ? Qu’il pose la question à ses propres ouailles, choristes de surcroît, pour s’en édifier.

Seigneur Tabu Ley, King Kester, Ngiama Werrason, le Roi de la forêt, Nico Kasanda dieu de la guitare, Grand-maître Luambo Makiadi, Beyou Ciel etc. ne sont que pseudonymes d´artiste ou des surnoms. Cela ne reflète aucune réalité dans la plupart des cas, aucun blasphème non plus, qui pourrait se trouver que dans la tête d’un fanatique religieux.

Je dois absolument dire, avant de terminer, qu’une assemblée de milliers d’adeptes n’est pas synonyme de la puissance ni de la présence du Saint-Esprit dans ce temple. Parce que nous savons que d’autres églises constituent l’antre de Satan, comme disent les Chrétiens. Ce serait vraiment déplorable si le pasteur le croit, puisqu’il accuse son collègue qu’il considère petit par rapport à celui que l’autre reprochait je ne sais plus quoi. Ici dans la ville de Kinshasa, des pasteurs de petites communautés chrétiennes inconnues du monde pastoral kinois valent spirituellement plus que la plupart des pasteurs de l’espace audiovisuel. Avec ce genre de raisonnement où l’action du Saint-Esprit est associée à la multitude de fidèles dans une assemblée, il n’est pas étonnant qu’on s’est habitué à dire faussement : “J’ai gagné beaucoup d’âmes à Dieu”. N’importe quoi !

Bonne journée !

Norvège, le 08 octobre 2023

Bababebole Kadite